Fille unique dans une famille catholique riche et puissante de New York, Chanelle n'a jamais manqué de quoi que ce soit. Son père étant architecte et sa mère styliste, elle a baigné dans l'art dans toute son enfance, ce qui peut expliquer pourquoi elle a une passion pour cet univers et adore l'art plastique et la photographie. Seulement, étant très souvent absent à cause de leur travail, elle a surtout été élever par sa grand-mère, dans les règles de l'art. Dimanche à la messe, prière avant les repas, c'est comme cela que ses journées étaient rythmés depuis petite. D'ailleurs elle ne se sépare jamais de son collier en or avec son pendentif en croix qu'elle à depuis à peu près toujours. Grâce à la foi et l'église, elle n'a jamais été l'une de ces adolescentes new yorkaises en pleine débauche, sombrant rapidement dans l'alcool, le tabac et la drogue pour être cool et faire comme les autres, bien au contraire. Elle n'a jamais touché à la drogue, et non plus au tabac. Ça ne lui intéresse vraiment pas de ruiner son argent de poche dans ce genre de choses qui ne servent à rien, si ce n'est d'avoir les dents jaunies et la bouche puant le tabac tous les jours. La fumée de la cigarette lui donne même des hauts le coeur. Et elle boit juste un peu de champagne pour les grandes occasions et déteste le goût de la bière. En gros, elle a souvent été vue comme une fille ayant un balais dans le cul, coincée, mais par rapport à ça, elle était tout de même incroyablement belle et les garçons l'aimaient bien car ça leur donnait un peu de fils à retordre s'il voulait se la faire ou l'avoir en petite-amie. Et peu de garçons pouvaient se vanter d'avoir couché avec elle. Pratiquement aucun en fait. Elle a perdu sa virginité à dix-sept ans, et ce n'était même pas avec l'un de ses petits-copains. En gros, c'était une sorte de blasphème dans sa famille, elle qui devait se réserver pour le mariage. Et oui, contrairement à sa famille, elle n'était pas autant portée sur les règles de l'église, malgré qu'elle avait un profond respect pour le Jésus. Elle ne l'a d'ailleurs jamais dit à ses parents, s'ils l'apprenaient, elle serait vraiment morte, métaphoriquement parlant. Surtout que l'histoire ne s'arrête pas là.

Il était là, devant elle. Elle le voyait, elle sentait sa présence et surtout, elle commençait un peu à avoir peur. Une boule se formait dans sa gorge alors que son fils s'avançait doucement vers elle avec ses petites jambes. Délirait-elle ? Devenait-elle folle pour qu'elle puisse le voir si nettement, si précisément alors qu'elle était censée ne jamais l'avoir vu et lui, ne jamais exister ? « Dis maman … pourquoi tu m'as tué ? » Tomber enceinte à dix-sept ans, c'était loin d'être la meilleure chose à faire. Ses parents étant de fervent chrétiens pratiquant, elle ne pouvait pas venir les voir, tout sourire et leur dire que de un, elle n'était plus vierge. Et de deux, qu'à cause de ce premier blasphème, un petit être allait grandir en elle, alors qu'elle n'avait encore pas de diplômes en poche, pas de boulots et qu'elle devrait se consacrer dorénavant plus à son enfant qu'à ses études. Hélas, les études comptaient plus que tout pour ses parents. Faire le plus d'études possible pour ensuite consacrer sa vie à aller à l'église, aider les gens et prier. Elle ne voyait pas vraiment à quoi cela servait, mais elle ne se sentait pas de leur dire la vérité. Elle ne voulait pas voir sur les visages de ses géniteurs la honte qu'elle représenterait une fois que toute l'histoire serait dite. Ils ne seront plus fiers d'elle, lui mettront encore plus la pression si cela est possible et peut-être même, la dénigreront. Encore si elle était de quelques années plus vieille, en ménage avec un homme avec qui se serait sérieux et que ses parents approuveraient. Mais elle n'était même pas majeure. Après avoir fait un test de grossesse et qu'elle s'était rendu compte qu'elle était enceinte, cela s'était révélé un choc pour elle. Après avoir longuement réfléchit, une boule d'angoisse au ventre, elle prit enfin une décision : avorter. Elle n'était pas obligée de le dire à ses parents pour avorter et pour son avenir, c'était certainement mieux. Et depuis, l'horreur. Elle le voyait partout, rêvait chaque nuit de lui, elle en était fatiguée. Il l'a hantait. « Dis maman … moi aussi j'avais le droit de vivre … » Peut-être que si elle l'avait dit à ses parents, tout serait différent. Peut-être qu'au nom de l'église, ils n'auraient pas voulu qu'elle avorte, auraient bénis cet enfant venu du ciel et tout ceci ne serait pas arrivé. Elle aurait été heureuse, portant dans ses bras son merveilleux fils, ses parents l'aidant avec les couches, la garderie, les études et l'éducation de son joyeux bambin. Malheureusement, c'était loin d'être ça. « Tu n'aurais jamais dû faire ça, tu n'aurais jamais dû me tuer comme tu l'as fait … quelle mère fait ça à son fils ? »Reculant à mesure que la vision de son fils avançait vers elle, elle finit par tomber sur son lit, son coeur battant à tout allure dans sa poitrine. Elle devenait folle, elle devenait folle ... Elle avait surtout énormément peur. Elle se sentait misérable, horrible, détestable. Qu'elle genre de personne était-elle pour avoir fait ça ? Elle ne méritait même peut-être pas de vivre alors que son fils n'était pas sur terre. Pourquoi avait-il fallu quelle tombe enceinte ? Pourquoi Dieu avait décidé qu'elle ferait avorter son bébé ? Elle finit recroquevillée sur son lit, pleurant toutes les larmes de son corps sachant que, ce soir encore, lorsqu'elle fermerait les yeux et tomberait dans les bras de Morphée, elle le verrait une fois de plus.

Elle n'en pouvait plus, il fallait que ça s'arrête. Quelques jours après son dix-huitième anniversaire, Chanelle décida d'emménager dans une grande maison, pas loin de celle de ses parents. Ils lui avaient offert comme cadeau, sachant qu'elle voulait devenir plus indépendante et que ce serait la meilleure solution pour cela. Elle s'était tranquillement installée et avait continué sa petite vie. Seulement, elle n'allait pas mieux. Elle rêvait toujours de son bébé, elle le voyait chaque nuit, elle sentait sa présence et voyait sa silhouette le jour. Il lui parlait et elle en devenait folle. Elle ne savait pas comment faire pour ne plus voir son visage, pour ne plus rêver de lui, pour redevenir en paix avec elle-même. Si ça continuait, elle savait qu'elle risquait de tomber en dépression, de ne plus se nourrir ou de se faire interner en hôpital psychiatrique. Alors, elle décida avant que cela devienne trop dur pour elle d'aller prendre rendez-vous chez un psychiatre. Ce jour-là, elle était très angoissée. Elle allait devoir parler à un inconnu de sa vie, de ce qui n'allait pas bien dans sa tête, et ça la rendait extrêmement nerveuse. Même s'il devait avoir souvent l'habitude des situations bizarres et des maladies mentales, elle était convaincue qu'il risquait de la prendre pour une folle, elle qui avait toujours peur de faire fuir les autres. Mais elle ne voyait pas d'autres solutions : elle ne pouvait pas passer toutes les nuits prochaines de sa vie à rêver de lui. Et c'était toujours hors de questions d'en parler à ses parents. « Vous pouvez entrer dans son bureau, il ne devrait pas tarder à arriver. » Chanelle fit un petit sourire poli à la secrétaire avant de se lever et de marcher doucement jusqu'au bureau. Là, elle s'assit dans un fauteuil et attendit patiemment, essayant de bien expirer et inspirer, dans le but de se calmer, en vain. Elle se sentait un peu débile de se trouver là, elle appréhendait beaucoup. Jamais elle n'aurait pensé avoir besoin de faire affaire avec un psychiatre. Puis la porte s'ouvrit et un jeune homme entra, un grand sourire sur ses lèvres, et se dirigea vers Chanelle. « Bonjour, je suis le docteur Emrys Andersson. Nous allons travailler ensemble et essayer de te faire aller mieux. » Elle lui sourit doucement, serrant la main qu'il tendait devant elle. Elle était pour ainsi dire comme hypnotisée par lui. Il était grand et élancé, imposant naturellement le respect et avait l'air trop gentil et bienveillant pour être vrai. Elle le trouvait immédiatement beau, elle qui n'avait pas pour habitude de tomber amoureuse du premier coup d'oeil. Elle était du genre à tomber amoureuse par rapport au temps, et non au premier regard. Pourtant, là, depuis qu'elle l'avait vu, elle se sentait différente et un peu mieux. Le problème, c'est qu'elle n'était pas en mesure d'être avec lui, étant donné qu'elle était sa patiente. Et ça, elle l'avait un peu oublié.

Malgré ses essais en vain de rester concentrer pour aller mieux, de ne pas perdre de vue son objectif, et de ne pas tomber amoureuse, elle avait fini par tomber sous le charme de son psychiatre. Avec lui elle était détendue, elle se sentait bien, calme et elle voyait de moins en moins son bébé depuis qu'elle travaillait avec lui. Mais au fond, elle souffrait. Elle allait mieux dans sa tête, mais son coeur allait de plus en plus mal lui. Qu'elle imbécile elle était de ne pas arriver à enterrer ses sentiments pour le jeune homme ! Cela faisait un peu plus d'un an qu'ils se côtoyaient en tant que patiente et docteur, et elle aimerait profondément que cela change un peu. Allez boire un verre, sortir ... Malgré ça, elle n'osait jamais lui proposer, elle savait très bien qu'il ne voudrait pas, car soi elle ne lui plaisait pas, soi il lui rappellerait que les patient et les docteurs ne peuvent pas être ensemble. La poise quoi. Il avait remarqué que plus ils avançaient, mieux elle allait. Seulement il comprenait aussi qu'elle avait mal autre part mais n'arrivait pas à comprendre ou et pourquoi. Si seulement il savait que c'était de sa faute. Pourtant, à son plus grand étonnement, leur relation évolua quelques mois plus tard. Elle était plus qu'heureuse. Il fallu d'un simple petit café au Maclaren's pour qu'ils s'embrassent enfin. Elle l'aimait, il l'aimait, elle voyait enfin une porte de sortie par rapport à sa maladie, elle voyait une ouverture sur l'avenir avec lui. A sa plus grande surprise, ils vécurent ensemble heureux pendant trois ans. Ça plus longue relation, elle qui n'étais jamais vraiment sortie avec un garçon. Elle était pire que nulle dans ce domaine. Séduire, draguer ... C'était loin d'être sa tasse de thé. Mais avec lui, avec Emrys, s'était tellement plus facile. Jusqu'à ce jour. Ils devaient revenir d'une soirée entre amis. « Je vais prendre un taxi chérie, je dois aller faire un détour d'abord. » avait-il dit en lui déposant un baiser sur ses lèvres. Voilà comment tout avait commencé. Elle avait pris leur voiture et s'était dépêchée de rentrer chez eux. Elle l'attendu pendant près de deux heures. Jusqu'à ce que la police sonne à sa porte. « Vous êtes Mademoiselle Deluca ? » Une énorme vague de peur l'envahit, elle sentait que quelque chose n'allait pas. Pourquoi des policiers se tenaient devant elle et pas son chéri ? Pourquoi la regardaient-ils d'un air aussi grâce ? Une boule se formait dans sa gorge alors qu'ils commencèrent à parler. Et puis, la vérité éclata. Et avec elle les larmes de la jeune fille. Elle ne pouvait s'arrêter de pleurer toutes les larmes de son corps. Ses jambes vacillèrent alors qu'elle retomba sur le sol sous le choc. Son amoureux venait de se faire tuer dans un accident de voiture alors qu'elle avait appris ce matin qu'elle était enceinte de deux mois de son enfant.

C'est lorsqu'elle était à nouveau au bout du gouffre qu'elle la rencontrée. Chanelle était à une table au Maclaren's, les yeux noircies de son maquillage qui coulait sur ses joues à cause de ses pleurs, un jus de fruit à côté d'elle. Ce soir-là, elle aimerait tellement prendre de l'alcool et se bourrer la gueule jusqu'à pas d'heure. C'était loin d'être dans ses habitudes, mais elle se sentait tellement mal. Une douleur au fond du coeur qui ne voulait plus partir. La seule chose qui l'empêchait de boire, c'était qu'elle était enceinte de deux mois. Et cette fois-ci, il était hors de question qu'elle avorte ou quoi que ce soit : ils en avaient rêvé avec Emrys, ils en voulaient un depuis quelques mois, et comme par hasard, le jour où elle apprend la bonne nouvelle, il se fait tuer. Foutu accident de voiture de merde. Alors, pour honorer Emrys, pour garder une part de lui avec elle et pour lui prouver en un sens son amour, elle le garderait. Elle aurait ce bébé et s'en occupera du mieux qu'elle le pourrait. Seulement, faire ça toute seule, avoir perdu l'homme qu'elle aimait ... C'était trop d'un coup. Elle trouvait la tâche insurmontable. Il fallait quelle tienne, mais elle se trouvait au fond du gouffre, elle ne trouvait plus de solutions pour continuer à tenir, elle se trouvait seule et malheureuse. « Mauvaise journée ? » Elle releva la tête en sursautant, ne s'attendant pas à ce que quelqu'un vienne à sa table ou lui parler. De toute manière, elle n'avait envie de voir personne. Elle avait une vie de merde, c'était tout. Elle avait toujours été raisonnable dans sa vie, pour au final, n'avoir que de la malchance. Dans sa prochaine vie elle se droguerait et boirait cuite sur cuite, on verra bien ce qu'il en dira le seigneur. « Vie de merde. » répondit-elle doucement. La belle blonde qui se trouvait devant elle sortie de sa poche un paquet de mouchoir qu'elle tendit à Chanelle, un petit sourire sur ses lèvres. Elle avait l'air gentille et très sociable, le genre de fille à qui tout réussi. « Tenez. Moi c'est Arizona. » Chanelle pris doucement le paquet puis un mouchoir, avant d'essuyer ses larmes. C'était parti comme ça. Elle ne comprenait pas vraiment pourquoi cette fille avait eu envie de la voir, envie de l'aider. C'était un peu comme un ange tombé du ciel en fait. Elle était arrivée et tout c'était arrangé au fil du temps. Elles étaient devenues meilleures amies, se trouvant pleins de points communs et délirant pour un oui ou pour un non. Elles avaient même décidé de devenir colocataire, pour se voir tout le temps et s'entraidait quand les choses n'allaient pas fort. Et puis, quand Chanelle à accoucher d'une petite fille, elle avait eu besoin d'une vraie amie qui l'aidait à la changer, qui la gardait quand elle avait trop de boulot et qu'il lui fallait un peu concentration, tout ça. En fait, l'arrivée d'Arizona avait complètement changé sa vie, pour le meilleur.