« Percy tu peux prendre ta pause. » Je relevais la tête d'un livre que je lisais depuis environ une heure. Depuis ce matin on avait vu peu de clients passés, à part les habitués bien entendu. Je regardais mon collègue Marx avant de sourire et d'aller prendre ma veste qui était accrochée au porte-manteau dans la réserve. Cet après-midi allait être légèrement plus longue que les autres, il fallait que l'on mette en rayon les nouveaux livres arrivés et aussi mettre le coup de cœur du mois et cela faisait environ deux semaines que Marx et moi on se battait pour savoir lequel aurait ce titre. On avait des goûts bien différents et cela compliquait les choses. J'enfilais ma veste et pris les clés de la boutique – au cas où – avant de me diriger vers le Starbucks qui se trouvait à une dizaine de minutes à pied. Je déjeunais souvent là bas: c'était bon, rapide et on trouvait toujours quelqu'un que l'on connaissait. Je croisais souvent des amis et discutait avec eux pendant cinq minutes avant qu'ils prennent la poudre d'escampette pour aller travailler. Le ciel était gris, un vrai temps à rester sous la couette et à regarder des films au chaud. Je commençais déjà à avoir froid aux mains, je les frottais entre elles pour trouver un peu de chaleur avant de passer les portes du Starbuck. La chaleur du lieu me fit un bien fou et mes joues rosirent un instant. Il y avait du monde qui faisait la queue et je pris place afin de prendre mon tour. Je rêvais déjà d'un hamburger frites, d'un cheesecake. J'étais le genre de fille qui mangeait tout et n'importe quoi mais qui faisait du sport et donc n'avait pas trop de soucis à se faire. Par moment je m'écœurais moi-même quand je voyais tout ce que je pouvais manger. Le pire avait été quand j'attendais Eliott et que je pouvais manger une quantité de nourriture assez impressionnante. Quand je voyais à présent mon petit montre qui mangeait pour deux je ne me posais plus de questions sur le fait d'avoir manger autant pendant neuf mois. La queue avançait lentement mais surement. Mon estomac criait famine et j'avais hâte de croquer à pleine dents dans quelque chose de chaud et de réchauffer mon corps.

Le temps de faire la queue, j'avais pris le temps de répondre aux sms de mon téléphone portable avant de me rendre compte que c'était mon tour. Je commanda un sandwich et un cheesecake avec une bouteille d'eau. Finalement j'avais changé d'avis, vu le monde je ne voulais pas attendre trois plombes pour pouvoir manger. Je paya ma commande et la pris en main avant de longer la file pour aller m'asseoir à une table... Une seule table de libre vu le monde, et dont la personne était quelqu'un que je connaissais. A présent c'était sûr, chaque sortie au Starbucks allait résumé au fait que je rencontrerai à chaque fois une connaissance. Je ne voulais pas manger dehors et me les geler, ainsi je décida de m'y asseoir quand même, ne lui demandant même pas si je pouvais. Ce n'était pas que j'étais sans gêne, mais depuis quelque temps j'avais une dent contre lui. C'était Roman. Le petit ami de Merry. Au début j'étais heureuse qu'il rencontre quelqu'un vu à tel point qu'il est bizarre, mais savoir que Roman le trompait me mettait hors de moi. J'avais beau dire que Merry était idiot ou encore abruti, je l'aimais énormément et voir qu'on lui faisait du mal, je ne le tolérais pas. « Tu es venu draguer le serveur pour le mettre dans ton lit? Après tout je suis persuadée que tu aimerai en ajouter un à ton palmarès. » Round 1 GO! Je débouchais ma bouteille d'eau avant de boire quelques gorgées. Oh oui j'allais lui pourrir son déjeuner, j'allais l'achever, mon dieu je voulais qu'il souffre. Hum, mais si je touchais à un seul de ses cheveux et qu'il allait dire à Merry que je l'avais martyrisé celui-ci allait forcément m'en vouloir? Quoiqu'il était si candide qu'il ne s'en rendrait même pas compte. « Donne-moi une raison, pour pas que je te plante un couteau? » Fis-je en fronçant les sourcils et en plantant mon regard noisette dans le sien. Je commençais à manger tranquillement, je sentais que ce déjeuner allait être passionnant...

Vous savez ce qui était le pire dans l'histoire? C'était de se faire prendre pour une conne. Pardon de la vulgarité mais c'était la pure vérité. J'avais mes yeux rivés dans les siens, cela faisait longtemps que je n'avais pas ressenti autant de colère dans mon corps. Je me rappelais de l'avoir vu l'autre soir, au bras d'un mec qui n'était même pas Merry. C'était une des rares soirées que je m'accordais. J'avais rejoint une amie d'enfance pour se faire un restaurant et un cinéma et parler de nos vies respectives. En rentrant je l'avais surpris, mais je n'étais pas allée le voir car je me disais qu'il valait mieux pas que j'éclate de suite. Aujourd'hui, était le jour de la vérité. J'étais assise en face de lui – par pur détail, puisque je n'avais trouvé aucune place vide et que je ne souhaitais en aucun cas finir en statue de glace dans le Central Park. Je l'avais attaqué directement, à peine avais-je poser mes fesses sur la chaise et je le regardais droit dans les yeux. Je tentais tant bien que mal de ne pas ciller, de ne pas perdre ma concentration. On aurait cru que j'étais sur le point de le sauter à la gorge telle une lionne chassant une gazelle en pleine savane africaine. Le pire? Il rigolait, du moins il avait un sourire sur son visage qui me donnait envie de le gifler. Un sourire rempli d'innocence que même mon fils de quatre ans ne me faisait pas. J'étais en train de manger quand je lui demandais de me dire une chose pour ne pas que je lui plante un couteau et là son sourire s'effaça. C'est bien il avait compris cet infidèle qui allait briser le cœur à mon meilleur ami. Je bus de nouveau, comme si la colère me donnait des bouffées de chaleur. J'avais soif et valait mieux que je me calme de suite s'il ne voulait pas qu'il y ait un mort dans le starbuck, et en plus ce serait lui. C'était qu'il me prenait pour une parfaite petite idiote? Il me déclarait qu'il ne savait pas de quoi je parlais, oh sérieusement? Je riais intérieurement, et justement un rictus traversa mes lèvres tandis que mon regard s'assombrit d'avantage. « Tu te moques de moi? » Je n'avais pas tapé du poing sur la table pour ne pas que l'on se fasse remarquer, mais ce n'était pas l'envie qui me manquait.

« En quoi j'aurais de la considération pour un type de ton genre? » J'aurai envie d'éclater de rire, mais je n'y arrivais même pas tellement cela me dégoutait. De la considération pour lui, qui avait trompé mon meilleur ami candide. Même pas en rêve. Je mangeais tranquillement et après avoir avaler une bouchée de mon sandwich au poulet je repris la parole: « Je t'ai vu l'autre soir et fais pas genre qu'il ne s'est rien passé, car on sait tout deux que toi et moi, tu as trompé Merry! T'es vraiment un enfoiré! Pourquoi t'as fait ça hein? Si tu n'aimes pas Merry tu n'as qu'à le quitter au lieu de le manipuler! Ce n'est qu'un gamin qui croit limite au prince charmant! » Je roulais des yeux en soupirant longuement. C'était le portrait même de notre relation commune: Merry n'était qu'un enfant dans un cœur d'adulte qui voyait en roman le preux chevalier voyageant sur son cheval blanc pour venir le secourir. Mon dieu s'il savait il allait croire que c'était de sa faute. Quoique oui d'un côté c'était aussi de sa faute, il ne voulait même pas concrétiser avec son petit copain, il faudrait que j'en parle avec lui. Hum...avoir des leçons de morales d'une fille qui a eu un enfant hors mariage pour un homme très religieux c'était assez risqué. Merry, Merry, Merry qu'est ce que j'allais faire de toi? En tout cas je ne pourrais pas me taire, je ne pourrais pas faire comme si de rien n'était. Je ne pourrais pas te laisser aux mains de ce type qui finalement n'en avait rien à foutre pour te tromper dès que l'occasion se présentait. Je pris mon couteau à cheesecake. « Dis-moi une seule bonne et véritable raison pour ne pas que je te les coupe de suite! » Fis-je en tournant le couteau en direction de son pantalon. C'était un geste qui le ferait plus flippé qu'autre chose, je ne le ferais en aucun cas je ne castrais pas les hommes même si je trouvais qu'il mériterait une véritable et horrible correction. Je souris de toute mes dents comme un genre de sourire sadique.

Avais-je l'air de plaisanter? J'étais furieuse, au bord de le frapper s'il continuait de me sourire avec son air foncièrement débile. C'était qu'il me provoquait légèrement. On savait tout deux, lui et moi qu'il avait fauté dans son attitude. Pour moi quand on sortait avec quelqu'un on était fidèle, à croire que ça, il ne le comprenait pas. Merry n'était qu'un pauvre enfant qui était en train de se faire manipuler à coup de bisous et de câlins chastes. Devant moi se tenait celui qui le manipulait et j'avouais que je commençais à en avoir marre de sa tête d'homme mignon qui se considérait comme non-fautif. Je n'avais pas eu la berlue, je l'avais bien vu ce soir là en train d'embrasser à pleine bouche un autre homme que Merry et je n'imaginais même pas ce qui s'était produit par la suite de cette nuit. Mes doigts tapotèrent sur la table d'un air impatient, j'avais l'impression de commander un interrogatoire. Lui, le suspect, moi, le commissaire. Me manquait un chapeau et un grand manteau avec une insigne de police. Une lampe aussi pour mettre de la lumière en plein visage du suspect en déclarant: vas-y avoue! J'aurai fais une très bonne enquêtrice policière si je l'avais voulu par le passé! J'avais mes yeux rivés sur lui. Jamais je ne pourrais avoir de la considération pour un type comme lui: une véritable pourriture qui se moquait des sentiments d'autrui. Je tentais par tous les moyens qu'il avoue, et je voyais bien dans son regard qu'il commençait à être mal à l'aise de ma présence. Oh le gênais-je peut-être dans ses actes futures: à savoir, se retaper quelqu'un derrière le dos de Merry? Possible... Pourtant ce qu'il me fit le plus tiqué c'est le fait qu'il me dise: quel soir? Pour moi, c'était une question assez étrange. Justement mes sourcils s'étaient arqués et je déclarais du tac au tac: « Quel soir? Ça veut dire qu'il y en a eu plusieurs? » Je le regardais au fin fond de ses prunelles en essayant de le faire craquer. « Le soir dont je te parle, c'était la semaine dernière, mardi plus exactement. Je suis rentrée à pied et quelle n'était pas ma surprise quand je t'ai vu collé à un mec en l'embrassant langoureusement et que ce n'était pas Merry. Vu jusqu'où ça allait je suppose que tu l'as mis dans ton lit, et ne me mens pas. Mentir c'est un péché. Tu n'aimerais pas aller confesser tes péchés chez le Père Canterburry en disant que tu es avec son fils et que tu as commis le péché de l'infidélité? » Je me félicitais à moi-même. J'étais contente de moi et de mes paroles envers celui qui s'amusait avec l'âme de mon meilleur ami. Prépare-toi Roman, cela n'est que l'entrée du repas fatidique.

Geste théâtral, je pris mon couteau en le pointant sur ses bijoux de famille. Bien entendu je ne ferais rien de bien méchant, mais de le voir de suite croiser les dents me fit sourire. Il avait si peur que le couteau parte de ma main pour rejoindre son pantalon? Voyons je n'étais pas aussi sadique qu'il le pensait... si? Je le vois terriblement mal à l'aise, et quand il me dit qu'il en aurait besoin pour Merry je ne peux m'empêcher de rire avant de reposer le couteau sur la table. « Tu crois vraiment que Merry couchera avec toi par un simple claquement de doigts? Toi et moi on le sait très bien: Merry n'est qu'un môme qui croit que les bébés tombent du ciel. Je ne veux pas te désespérer, mais je te souhaite vraiment bonne chance pour concrétiser avec lui. » Je me remis à manger mon sandwich au poulet. Il n'allait pas me contredire, il savait ce que je disais. Merry ne parlait jamais de sexe, et quand on prononçait ce mot de notre bouche il nous suppliait d'aller nous confesser. Je me mis à rire quand il me disait qu'il déconnait, il croyait vraiment que j'avais failli le castrer? « Je ne suis pas Jack L'Eventreur, castrer des hommes ce n'est pas mon truc, bien que certains le mériteraient... » Déclarais-je avec un sourire en coin avant de boire un peu d'eau. Voilà qu'au détour d'un bout de mon sandwich je le vis me faire à la limite les yeux du Chat Potté, et qu'il me.... suppliait? Mon dieu, il était si désespéré pour en arriver là? Je commençais à me sentir mal à l'aise. Il voulait que je ne dise rien à Merry, de toute cette histoire, mais est-ce que moi j'allais arriver à tenir parole. « Franchement, je ne sais pas. » Je me mis à réfléchir quelques secondes en regardant par l'extérieur de la baie vitrée du Starbuck en prenant un air terriblement pensif. Je jouais tellement bien la comédie non? Je posa le sac en papier où avait été mon sandwich – qui était à présent vide – sur la table et je croisa mes mains. « Donne moi une bonne raison pour ne pas que j'aille lui dire? Car vois-tu, je n'y crois pas à ton histoire que tu l'apprécies vraiment. Si tu l'appréciais tu aurais réfléchi à deux fois avant de sortir ton engin pour prendre ton pied! Tu respecterais Merry tu ne crois pas? Tu as juste peur que sa meilleure amie qui a tout découvert aille tout cafter et que tu te retrouves sans lui, et que tu n'arrives jamais à concrétiser. C'est quoi ton but avec Merry? Arriver à ses fins? Donne-moi une raison et une très bonne raison afin que je ne l'appelle pas de suite... » Fis-je en sortant mon téléphone portable et en le regardant avec un sourire sadique. Tu vas pleurer Roman...